L’hyper valse des mètres carrés
Surf as
Les hypermarchés autour de Nantes jouent au filou, manient le flou des lois ou les contournent. Qui c’est caddie que c’était pour le bien des consommateurs ?
Si vous êtes hyper ‑hyperquoi, peu importe‑, vos grandes surfaces vous démangent. Il faut s’agrandir. Toujours plus. Normalement, il faut postuler devant la CDEC, Commission départementale d’équipement commercial. Mais la loi, bonne fille, se laisse bousculer. Exemples :
Auchan Saint-Sébastien. L’autorisation signée en avril 1989 prévoyait 14 900 m² de vente, à répartir entre hypermarché, galerie marchande, bricolage, jardinerie, centre auto… Depuis, la Socorena, société dépendant du groupe Continent a été rachetée par Auchan et dissoute. Mais Auchan s’est approprié l’ensemble des surfaces octroyées, oubliant les mètres carrés déjà occupés par des sociétés indépendantes comme la jardinerie Delbard ou les jouets Toys R Us. Les extensions d’Auchan ont fait semblant de se limiter à ce qui était autorisé, reprenant à leur compte des surfaces déjà construites et qui ne dépendent pas du groupe. L’effet de l’entourloupe : les surfaces illégales échappent à l’impôt foncier et la taxe professionnelle.
Auchan à Saint-Herblain. Par un hasard étonnant, les réserves (qui ne sont pas concernées par les demandes d’extension) ont changé d’affectation, devenant zones de vente. A se demander si tout n’était pas manigancé dès le départ : il a suffi de faire disparaître une cloison, le carrelage étant le même, côté rayons et côté ancienne réserve. L’ex-surface de stockage a par magie intégré sans autorisation l’espace commercial du magasin. Venus constater l’embrouille, les responsables d’une association de commerçants se sont fait jeter par les vigiles.
Décathlon à Atlantis. Fin 1993, la commission nationale refuse la première demande à 5000 m². L’enseigne de sport biaise ce refus, dépose un dossier pour 3500 m2. Accepté. Puis est adjointe une surface légèrement inférieure au minimum exigeant une autorisation en commission. L’astuce : sous même enseigne, le rajout est une structure comptablement différente, entrées et caisses séparées. Chambre de commerce, préfecture, Direction de la concurrence et des fraudes, personne n’a bronché. Les avocats des hypers ont réussi un tour de force : faire déclasser des mètres carrés dans les « espaces » dits culturels récemment créés pour rivaliser avec la Fnac. Le calcul des surfaces de vente y utilise le moindre fauteuil à côté de bouquins ou de disques pour décompter autour de ce repose fesse les mètres carrés considérés comme non commerciaux.
La grande distribution, c’est hyper simple : il faut d’abord être un super technicien de surface.