Le crime de lèse-majordome

Publié par lalettrealulu le

Presse-purée

On ne devrait jamais parler aux journalistes. Un simple citoyen peut être traîné devant les tribunaux pour ça. En tous cas en Vendée, terre d’exception. Le 2 juillet dernier, à l’incitation de Bruno Retailleau, ex-député et toujours majordome de Villiers, le tribunal des Sables d’Olonne a condamné le docteur Jack-Olivier Brayet (par ailleurs ancien responsable FN de Vendée jusqu’aux dernières législatives) à 40 000 F d’amende, dommages et intérêts, et frais de justice. Son crime ? Avoir, en organisant une conférence de presse, informé les journaux locaux du dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile contre un satellite du Département, la SODEV*, aujourd’hui présidée par le susdit Retailleau**. Juste après, en août 1997, la citation directe lancée par Retailleau a invoqué la loi sur la presse de 1931 interdisant de « publier, avant décision judiciaire, toute information relative à des constitutions de partie civile ». Ce type de plainte en direct est destiné à contrecarrer le cas échéant l’inertie d’un parquet. La presse peut se contenter de raconter l’histoire sans évoquer le dépôt de plainte. Mais là, rien du tout. Les journaux du cru n’ont pas accouché d’une ligne sur le sujet. Les juges sablais ont donc ratissé très large en considérant que tenter de « rendre public » même sans succès équivaut à « publier ». C’est tellement incongru que le ministère public a aussitôt fait appel du jugement. Le médecin aussi, faute d’avoir médité le proverbe vendéen : pour vivre heureux, vivons muets.


* Société pour l’aménagement et le développement économique de Vendée.
** Plainte que le docteur Brayet a lancée au nom de son association de contribuables, Vendée 2 000, suite à un rapport de la chambre régionale des comptes épinglant la SODEV. La plainte a depuis été classée par le parquet de La Roche-sur-Yon.