Gauche plus rien à Couëron
Zinzin
Suspense à Couëron où, entre le Fougerat à col rose et le Naizin à crête verte, la gauche plurielle joue un remake des Oiseaux. Des noms d’oiseaux, surtout.
N’est pas Machiavel qui veut. Malgré la haute opinion qu’il a de lui-même, Patrick Naizin, président départemental des Verts et adversaire du socialiste Jean-Pierre Fougerat sur Couëron, risque de l’apprendre à ses dépens. Pourtant Naizin partait sûr de lui : « Je n’exclus aucune surprise à Couëron, y compris de battre Fougerat. » Parachuté par les Verts* dans cette commune de l’agglo, il a bâti sa stratégie sur l’accord départemental passé entre son parti et les socialos, certain que Fougerat serait bien obligé de céder aux instances de son parti, à savoir lui refiler un poste d’adjoint et surtout une place à la Communauté urbaine. Sauf que voilà, Fougerat n’a pas cédé : « Je prends mes responsabilités », a asséné le têtu qui n’entend pas qu’on fasse la loi à sa place dans sa commune.
Après avoir tenté sa chance à Saint-Herblain et à La Montagne, en vain, Naizin s’est résolu à monter sa propre liste sur Couëron, prêt à affronter celui qu’il qualifie à présent « d’hégémonique » : « On n’est pas en Amérique du sud, il faut un peu plus de démocratie à Couëron. Il y a un rejet du système Fougerat, qui a atteint son seuil d’incompétence. » Bigre… Quand on pense qu’ils ont failli s’allier sur la même liste, on frémit pour la démocratie. Vaillant mais pas téméraire, Naizin a refilé le mistigri de la tête de liste à un cadre bancaire et néanmoins artiste du coin, un certain Jacques Testard, qui vient tout juste de rejoindre les Verts. « Testard a adhéré chez les Verts à la demande de Jean-Pierre Fougerat, précise-t-on chez les socialos, pour retirer le tapis sous les pieds de Naizin. Testard a juré ses grands dieux à Fougerat que jamais il ne se présenterait contre lui. Trois semaines après, il se retrouve tête de liste contre le maire… »
Ayrault en scène
Non sans difficultés, Naizin a tout de même réussi à monter sa liste. Bien décidé à enfoncer un coin entre Fougerat et les pontes départementaux du PS, Yannick Vaugrenard et Jean-Marc Ayrault. Il rappelle à qui veut l’entendre le savon que le maire de Nantes a passé à Fougerat le matin de la signature de l’accord Verts-PS, devant quelques hiérarques socialos et des écolos qui comptaient les poings : « Ton attitude est irresponsable, s’est emporté tout rouge Jean-Marc contre Fougerat, tu te comportes comme un enfant gâté, tu es en train de créer un précédent en remettant en cause l’accord Verts-PS ! » Rien n’y fait, Fougerat persiste et signe : Naizin peut aller se brosser.
Mais à écouter certaines mauvaises langues bien placées au PS, il semble bien qu’Ayrault lui ait joué sa grande scène devant les écolos afin de les endormir et sauver l’accord départemental. « En public, Jean-Marc a fait la leçon à Fougerat. Mais il se fiche de Naizin. Une fois Fougerat réélu, Naizin n’existera plus pour lui. Alors que Fougerat, si : n’oublions pas que Couëron est sur la circonscription de Jean-Marc et qu’il lui garde au chaud ses électeurs…«
Naizin n’est pas totalement dupe de la petite comédie. Mais il est désormais trop tard pour faire machine arrière. Il fait feu de tout bois : « Fougerat a les mains liées par ses trois adjoints. M’offrir une place sur sa liste, c’était en sacrifier un. Ils le tiennent. Mais qu’importe, Fougerat est aujourd’hui politiquement mort. Ne manque plus que la date de l’exécution. » Remonté à bloc, Patrick Naizin a déjà affûté le couperet : « Fougerat ne voulait pas de quelqu’un comme moi qui lui aurait fait de l’ombre. C’est un faible, intellectuellement faible. » Et de trancher : « Jean-Pierre Fougerat est fou, autiste et suicidaire.«
Les socialistes rigolent en douce : « Naizin n’a pas compris que c’est lui qui se fait manipuler, par tout le monde, les Verts, Ayrault et même certains membres de sa liste qui ont des comptes à régler avec Fougerat. Il est aveuglé par son propre ego et pris à la gorge par ses besoins personnels. » Certains, à voix basse, confient même que le président des Verts « était prêt à lâcher le poste à la communauté urbaine si Fougerat lui donnait les indemnités correspondantes ». Un simple poste de conseiller municipal lui aurait suffit, « à condition d’avoir une secrétaire ». À quoi ça tient, parfois…
Une consolation pour les Couëronnais : avec tous ces noms d’oiseau que se balancent les candidats aux municipales, leur réserve ornithologique n’est pas prête de disparaître. Et ça, c’est écolo.
* Voir Lulu n°31, “Un béret vert saute sur Couëron”.