Jean-Luc par terre, c’est la faute Harousseau
Une liste adroite
Qu’on se le dise, Jean-Luc Harousseau n’a rien à voir avec la « vieille droite nantaise ». D’ailleurs, ça se voit comme un faux nez au milieu de la figure…
Y aurait-il un bon docteur Jean-Luc et un mister Harousseau ? Brandissant le drapeau du centre-droit modéré, portant son humanisme en sautoir, le nouveau chef de file de l’opposition nantaise le jurait cet automne : c’en était fini de la vieille droite nantaise ringarde, divisée, flétrie par les défaites successives de ses têtes d’affiche, les Augereau, Bazin, Papon et compagnie. Le torse gonflé d’un « souffle nouveau », Jean-Luc nous promettait du sang neuf, pas comme cette réac de Du Roscoät « qui ne sera pas sur sa liste*. » Bref, on allait voir ce qu’on allait voir…
En lieu et place des vieilles badernes, le docteur Harousseau se faisait fort d’ouvrir sa liste à « la société civile », c’est-à-dire à des petits nouveaux qui n’auraient pas grandi dans les décombres des vieux partis. Jean-Luc, qu’on était venu rechercher presque en le suppliant, était bien décidé à faire table rase du passé pour reconstruire une droite moderne et tolérante. C’était ça, « l’audace d’être sincère ».
Du passé faisons table rase
On imaginait bien que ces belles résolutions allaient passer sous les fourches caudines des appareils, négociations obligent, mais qu’investi de sa nouvelle autorité, le sympathique Jean-Luc réussirait globalement à tenir parole. Sa liste allait donner un sacré coup de vieux au « sectaire » Ayrault tout englué, au bout de deux mandats, dans son « système » quasi brejnevien.
Et la liste est sortie, un matin pluvieux de janvier. Douche froide. La vieille droite nantaise n’était pas tout juste enterrée qu’on la retrouve ragaillardie sur la liste Harousseau. Le « souffle nouveau » se nomme Monique Papon, Jean-Pierre Bazin, Robert Diat, Loïc Le Masne de Chermont, Jean-Pierre Le Ridant, Patrice Chéreau… Sans oublier l’indécollable Du Roscoät. Tous déjà présents au temps jadis des Chauty, Hubert et Augereau, lui-même accroché en queue de la liste Harousseau. Un véritable élixir de jouvence. Mais ne soyons pas injuste, le bon docteur Jean-Luc a quand même ouvert sa liste à plein de nouvelles têtes, dignes représentantes de la « société civile ». Comme de juste aucune n’affiche d’appartenance politique. Sauf à y regarder de plus près.
Des petits jeunes comme on n’en fait plus
Prenez la douce Véronique Robet par exemple, numéro deux de la liste, “spécialiste des questions de délinquance”. Un esprit libre comme pas deux, en réalité une vieille copine de Villiers, déjà présente sur la liste Hubert. Ou la gentille Claire Fresson, en fait affiliée au CNI de Du Roscoät, déjà présente sur les listes Augereau et Hubert. Idem pour le frétillant André Augier, orfèvre de la culture, CNI et déjà présent sur la liste Hubert. Ou encore la charmante Céline Barré, à peine trente ans et déjà présente sur la liste Hubert, RPF comme son ami Joël Bonnemaison, un vieux pote à Le Pen. Restent de vrais nouveaux : Laurence Rousseau, RPR, qui usa ses fonds de culotte sur les bancs de la fac dans les rangs de la très droitière UNI, Christophe Moison, partisan du libéralisme sauvage issu du madeliniste club « Idées-Actions »…
La sincérité de départ de Jean-Luc Harousseau ne saurait être mise en cause. il l’avait d’ailleurs confié à Lulu : « Je passe mon temps et mon énergie à me battre contre les appareils au lieu de construire un projet. » Allons Jean-Luc… Remettre en selle les apparatchiks de la bonne vieille droite nantaise du siècle dernier, c’est un projet. De réinsertion.
* Ainsi qu’il le confia à Lulu.
Je me voyais déjà… Le cabinet fantasme
Peuple de droite, vous ne le saviez pas, mais Jean-Luc Harousseau est déjà maire de Nantes et ses colistiers sont les adjoints de la Ville de Nantes. Inutile par conséquent de vous déplacer aux urnes, si l’on en croit le journal de campagne du candidat. Ainsi, en page 2, un certain André-Hubert Mesnard est présenté sous le titre « adjoint au maire en charge de l’urbanisme ». Plus loin, Véronique Robet s’attribue les fonctions de « maire-adjoint spécial à la sécurité et à la prévention de la délinquance. » L’un est professeur de droit, l’autre est avocate. Nous ne saurions que trop leur conseiller de réviser leurs classiques, ou plus exactement le code pénal, section 9, article 433 – 17 : « L’usage, sans droit (…) d’une qualité dont les conditions d’attribution sont fixées par l’autorité publique est punie d’un an d’emprisonnement et de cent mille francs d’amende. » Ce juridisme est d’un pointilleux ! Si on ne peut plus rêver à voix haute, où va la démocratie ? Une chose est sûre, à défaut d’un « souffle nouveau », l’équipe d’Harousseau ne manque pas « d’audace ».