La dérive hétéro
Église intégriste
L’abbé intégriste menait grand train. Des sous sous la soutane, et une conduite pas très catholique ont forcé le prêtre défroqué à se faire blanchir par un tribunal.Les voies du Seigneur sont pénétrables.
Un grand danger menace l’Église intégriste. Livrés aux convoitises de créatures du diable, de bons abbés risquent de trousser leur soutane à boutons. On croyait les serviteurs de Dieu, même les plus raides, livrés aux démons de pulsions pédophiles. Il y a pire. Parfois, une femme peut faire tourner la tête d’un berger des croyants. Ainsi, l’abbé Jimenez Torres qui donne la messe en latin. D’accord, il ferait mieux de la vendre. Le schisme ne paie pas. Passé dans les troupes de Mgr Lefebvre avec missel et soutane, l’abbé s’est trouvé fort désargenté. Devenu « prêtre valgus », sans subsides ni sécu, l’ecclésiastique a su se faire entretenir par les ouailles ultras (prononcer fidèles) chargées de cracher au bassinet (prononcer bénitier). Foutredieu ! Seulement voilà, les brebis qui se sont fait tondre par le berger ont porté plainte devant la justice des hommes.
À l’audience le 14 mars, l’abbé aux vêtements très soignés a dû s’expliquer d’une accusation d’escroquerie. En portant plainte en 1999, Pierre et Christine Girard, pieuses personnes âgées « d’une particulière vulnérabilité », reprochent à l’abbé agrippe-sous de leur avoir estampé quelque 250 000 F en trois ans. Les juges ont souligné le confort quotidien de l’abbé, bien au dessus du standing d’un modeste serviteur de Dieu, qu’il faut en fait assimiler à un défroqué. Car Miguel partage la vie d’une créature d’une trentaine d’années qui a déclaré aux enquêteurs : « La femme que je suis est amoureuse, mais la catholique se l’interdit ». Depuis Adam et Eve, l’hétérosexualité fait d’énormes dégâts au sein du peuple de Dieu. Faudra-il interdire cette néfaste inclination sexuelle, ou simplement le sein, les dégâts ou le peuple ?
Pour son compte-rendu du procès, Ouest-France a appliqué sa déontologie très chrétienne en escamotant les noms des protagonistes et des lieux, n’évoquant qu’une « amie de cœur ». « Qu’il ait eu une petite amie, relève du commentaire médiatique », note Me Emmanuelle Renoul, avocate de l’abbé. Qu’importe, les écoutes téléphoniques des deux tourtereaux dénotent un goût certain pour le pognon, « On croirait un businessman qui ne sait pas comment faire pour échapper au fisc », commente le président De Jorna à l’audience.
L’enfant de chœur n’a pas de papa
« Il est vrai que je ne mène pas une vie d’ascète, mais tout ce que j’ai m’a été donné », reconnaît le bon défroqué chez qui les enquêteurs ont trouvé des artefacts de luxe, un stylo Mont-Blanc, des objets de culte payés 36 500 F à un antiquaire « par les offrandes des fidèles ». D’après Me Renoul, le couple Girard n’aurait porté plainte que par dépit : « Ils n’ont pas digéré que le premier rang de la chapelle traditionaliste soit occupée par des filles-mères et que l’enfant de chœur n’ait pas de papa. » Ces chapelles sont vraiment très mal fréquentées. Et c’est sans doute là que s’est noué le drame de la discorde avec l’abbé. Une « rixe de traditionalistes » en quelque sorte.
À l’occasion, la justice s’est un peu payé la fiole de l’enquête de PJ alors managée par le tonitruant commissaire Farinelli himself. Le président du tribunal raille l’ampleur du dispositif d’écoutes et d’interrogatoires, cinq auditions pour l’abbé et une garde-à-vue rallongée de 36 heures, « ce qui, espérons le, ne s’est pas fait au détriment d’autres investigations en matière de stupéfiants ou de grand banditisme… Il est vrai aussi qu’il est certainement moins dangereux de faire une filature sur Jimenez que sur certains braqueurs ».
Après une réquisition d’une peine de huit mois de prison avec sursis et 2 000 euros d’amende, l’abbé a été relaxé. Pourtant, dit un avocat, il n’était plus prêtre officiel, et ne respectait pas le dogme de Rome, il a donc abusé de fausse qualité pour soutirer de l’argent. Les victimes ont fait appel, puis se sont rétractées sous les pressions de leur entourage bigot. Dieu y reconnaîtra les sous.
Jocelyn Frusquin
Un Moulinsart facho
Son préchi précha, l’abbé intégriste Jimenez le dispense à l’abri des regards mécréants et des chrétiens de gauche, dans le Château du Plessis de Vair, à Anetz, près d’Ancenis. Un genre de Moulinsart facho. C’est le modeste pied-à-terre de Pierre Gauthier, candidat MNR aux sénatoriales en septembre dernier et aux dernières législatives dans la 7e circonscription de La Baule-Guérande, où il vient de faire 0,53%, franchissant de justesse la barre du demi pour cent. Imprimeur retraité à Treillières ; Pierre Gauthier est propriétaire du Léchalas, le petit bateau à moteur monument historique. C’est grâce à une association 1901, « Restauration et animation du Château du Vair » qu’il loue ses salles pour les mariages, 610 euros la soirée, sauf quand il faut ranger la mariée pour que les nostalgiques du nazisme viennent s’y congratuler. Le château, sa terrasse, ses salons, 550 personnes assises, sa piscine et son parc de 6 hectares servent à toutes les fêtes champêtres d’automne de l’extrême-droite locale. Le Pen y est venu en 1998, puis le MNR, Mégret en 1999, Jean-Yves Le Gallou en 2000, Franck Timmermans en 2001. Du champêtre bien gardé, ambiance octobre très brun. Que le parc soit fréquenté par du clergé marron relève d’une certaine harmonie ton sur ton.