Au néon du père
Dieu bleu
Pendant quelques mois, une grande enseigne de l’hôpital central de Nantes est en panne. Enfin à moitié. On devait confondre politique de santé et tentative de sainteté, car le néon bleu indiquant « Hôtel Dieu»* ne se lisait plus, à la nuit tombée, que « Dieu ». À la gauche de Dieu, tout s’était éteint. Comme s’il devait apparaître à tous, agnostiques et apostats compris, qui ne veulent pas croire une chose pareille. La chose pareille est ainsi déclinée dans les couleurs bleu néon mode, usitées par l’artiste Kersalé, à l’instar des fenêtres murées de la Fnac et de l’entrée de la piscine Gloriette. On ne voit donc pas pourquoi le centre hospitalier régional s’obstinerait à se faire passer pour un bouclard au Paternel présumé de l’Acrobate. À moins que l’hôpital se soit trop moqué de la charité, et qu’il lui faille une rédemption ici bas. Un électricien consciencieux a mis fin à l’extinction du mot « hôtel ». Pourtant cette survivance anachronique de la dénomination « Hôtel Dieu » montre que depuis bientôt un siècle, la France fait fi de la séparation de l’Église et de l’État de santé.
* « Le scandale bondieusard de l’hosto », Lulu n° 1, décembre 1995.