Les biscuits de famille brisés menus
La vente à Lulu, le vrai
Le p’tit LU en miettes pour cause de frais d’héritage. L’héritage de LU croqué par tous les coins. Il faut bien faire son ptit beurre.
On peut naître avec un biscuit d’argent dans la bouche et chercher à s’émanciper quand on devient grand. Louis Lefèvre-Utile, dernier né de la famille célèbre se trouva un peu désargenté quand la succession fut venue. Son père Patrick Lefèvre-Utile, décédé en août 2001, ne tenait pas du tout à voir se disperser le riche patrimoine industriel et artistique constitué par les figures historiques de l’industrie biscuitière familiale. Faute de tirelire à casser pour payer les frais d’héritage, Louis, le fils unique, a décidé de troquer ce qu’il doit à l’État contre la cession au musée nantais du château des Ducs quelques belles pièces de sa collection. L’objectif de l’héritier : échanger une soixantaine de pièces maîtresses du patrimoine familial, estimées 460 000 euros, contre l’effacement de la dette fiscale liée à l’héritage. Dossier compliqué entre le dernier des LU, les ministères de la Culture et des Finances, cette dation ne va pas aussi vite que prévu et monsieur Louis s’impatiente. Un jeune collectionneur nantais, Olivier Fruneau, s’instaure incontournable fournisseur officiel de toute expertise sur ce patrimoine LU. Et s’associe à l’héritier pour organiser une vente aux enchères du reste des objets publicitaires, prototypes, maquettes, peintures et esquisses originales. D’abord programmée à Nantes, au printemps 2003, puis reportée à l’automne, cette vente a finalement évité le fief de la famille. Monsieur Louis s’est dit déçu par Nantes. C’est vrai que vendre au plus offrant les clichés originaux des ateliers avec ces visages graves des ouvriers posant pour figer des yeux l’odeur sucrée des biscuits, ça peut faire un pincement au cœur à tous leurs descendants. Et ne pas être très flatteur pour le dernier rejeton du patron. À l’inverse des héritiers d’André Breton, Louis L.-U. n’assume pas le pragmatisme économique d’une telle dispersion du patrimoine. Il a préféré couper avec Nantes où il n’habite pas. Juriste à Paris, il n’a jamais trempé dans le biscuit. C’est finalement à Paris le 27 mai qu’ont été dispersés les derniers fleurons, 264 pièces de collection, d’une saga d’industriels éclairés, pionniers du paquadjingue. La vente a fait plus de 550 000 euros de recette. Bingo ! Le dernier de la lignée s’est débarrassé à bon compte de ces vieilleries. « La page est tournée. Il garde juste quelques pièces pour lui, à titre décoratif », indique Bertrand Guillet, conservateur au musée du Château. Les quatre « oreilles » du Petit-Beurre ont dû siffler.