Démantèlement d’un trafic de crème solaire au Palais de justice

Publié par lalettrealulu le

Comme tout citoyen, le magistrat n’est pas au dessus du droit à la paresse. Il est grand temps de dénoncer le scandale de ceux qui s’érigent en juges pour dénoncer le scandale de la flemme au tribunal.

Comment faire dégorger la justice engorgée ? Manque d’effectifs, de moyens ? Sûrement. Mais certains magistrats semblent ne pas se la couler si dure que ça. Des détenus ne voient pas leur juge d’application des peines, des divorces tardent un an, voire dix-huit mois… Les couloirs du palais de justice de Nantes bruissent de l’agacement du petit personnel devant le tir au flan érigé au rang de vertu par quelques magistrats. Pas quand ils triment jusqu’à trois heures du mat’ lors des sessions d’assises à rallonge, ou d’audiences correctionnelles achevées en nocturne. La critique vise ceux qui se préservent soigneusement un emploi du temps douillet en plus de leurs huit semaines et demi de vacances par an, voire plus pour les petits malins. Ce sont les artisans discrets d’un dysfonctionnement peu connu de la justice : le poil dans la main. Exemple : un juge pour enfants décide en douce de ne jamais travailler le mercredi, jour apparemment plus propice pour rencontrer les mômes concernés. Certaines greffières voient ce privilège d’un sale œil, alors qu’elles-mêmes sont à quatre cinquièmes de temps, mais avec réduction de salaire. Cherchez la flemme.

Dans un autre service traitant de contentieux spécialisés, un magistrat par ailleurs connu pour avoir généré nombre d’incidents avec avocats et justiciables et écopé d’un paquet de plaintes, se la joue pépère : volontiers « malade imaginaire », il décide chroniquement de ne pas juger les affaires les plus difficiles. Il a même réussi à refuser d’aller présider une audience. Comme ça, pas envie… Le caprice ne lui a valu qu’un simple courrier de remontrance de l’ancien président du tribunal. Pensant se débarrasser de ce juge nonchalant, le président lui a collé une notation très généreuse en lui souhaitant une bonne mutation. Raté : le juge qui se dérobe devant le travail a eu son avancement sur place. Et personne ne se bouscule pour le remplacer, sachant que les placards croûlent de dossiers accumulés, en attente de traitement. Merci du cadeau pour le successeur.

La justice se hâte avec glandeurs

Dans un autre service, un juge est crédité de bonnes statistiques, grâce à un discernement inné qui le pousse à ne régler en priorité que les dossiers les plus faciles à ficeler. Tout en faisant sauter des audiences par simple convenance personnelle quand il n’oublie pas de convoquer des parties à l’audience.

Un magistrat du parquet multiplie les heures de cours au centre de formation des avocats, à la fac de droit, à un institut de formation de secrétaires juridiques… Ce n’est pas interdit, mais ces escapades répétées l’obligent à refiler son boulot à ses collègues. Parfois, la Justice se montre curieusement expéditive, comme quand ce juge d’instruction se garde d’ordonner une expertise de la victime d’un pédophile, ou des investigations auprès des autres gamins approchés par le pervers, dont l’interrogatoire, pièce majeure du dossier, tient en deux lignes : « Je reconnais les faits et je les regrette ».

Mais ces magistrats surmenés par la gestion de leurs absences ont un alibi : il leur faut gamberger sérieux sur la réforme de la Justice. Et bien peser le contre et le contre pour s’opposer mordicus à l’idée de « commission d’examen des réclamations des justiciables », envisagée par un récent projet de loi. De la difficulté d’être juge et tout le temps parti.