Lettre ouverte aux gens qui les lisent
Nouvel Ouest : le martyrologue d’un groupe de presse
Cher Loulou, mon cher ami,
Nous avons appris avec émotion que tu as été condamné pour diffamation, en mars dernier, en correctionnelle à Rennes. Même si cette infamie devait rester inscrite sur un des volets de ton casier judiciaire, nous te gardons, sache le, toute notre estime. Car 10 000 F d’amende, c’est très lourd, quand on s’efforce comme toi, d’économiser sou après sou tous les mois pour sortir Le Nouvel Ouest au prix d’efforts surhumains, de surpassement de papier glacé et d’une surenchère d’autres qualités suréminentes. Et tous ces tracas s’abattent sur toi pour avoir repris les propos d’Irène Frain. L’amère écrivaine n’avait pas pu refréner son ire contre Michel Le Bris, traité d’ancien militant de la Cause du Peuple, ce qu’il est, mais aussi « revenu en Bretagne, le temps d’un livre », alors qu’il habite près de Rennes depuis 1977. La dame a accusé le monsieur de mercantile, coupable de vendre le concept du festival Étonnants Voyageurs « un peu partout dans le monde avec les royalties confortables qui s’y rattachent ». Condamnée au même tarif que toi, la piteuse madame Frain a reconnu à l’audience que depuis plusieurs années, elle était profondément blessée de ne plus être invitée au festival malouin et qu’elle a « exprimé sa blessure en termes affectifs ». En grand homme de presse que tu es, tu as fait dire par ton avocate que la liberté de la presse, la démocratie, tout ça. Mais on ne t’a pas entendu. Condamné, toi, quelle misère, en pleine gloire. L’histoire de la presse n’en sort pas grandie, ah ça non. Cher Loulou, notre ami, reçois l’expression de nos sidérations distinguées.
Lulu
Presse-Océan : la stratégie du schizophréning
Cher Chaise,
Félicitations mon cher, tu diriges un empire qui sait merveilleusement jouer la synergie entre ses fleurons, FC Nantes et Presse-Océan. Le 11 juin, alors que la menace gronde de retrograder le premier du championnat, un rédacteur anonyme de ton quotidien nantais a su porter le débat sur un autre terrain. Subtilement, il se livre à une attaque en règle des tarifs des abonnements de la prochaine saison à la Beaujoire, fondement même des équilibres financiers du groupe Socpresse. Certes, les fidèles de la tribune présidentielle voient tripler le prix de leur sièges à l’année, désormais à 7 500 F, prix d’ami. Sous le titre apparemment irrespectueux « le FC Nantes déçoit ses fidèles », on lit que le groupe Darmon a récupéré les 3 653 sièges de cette tribune prestigieuse pour les monnayer au prix fort à une clientèle d’entreprises. Maniant une fausse schizophrénie, l’article fustige le manque d’élégance du club et pire, sa « volonté de tout sacrifier au mercantilisme ». Quelle audace de marketing d’avant garde et de communication implacable. Certains diront que Presse‑O a marqué contre son camp. Erreur. La fausse polémique séduit les pingres – il y en a dans tout lectorat –, ceux qui fantasment sur l’indépendance de la presse, et permet en retour d’accorder de pleines pages au club pour justifier les nouveaux tarifs. Merveille d’orchestration d’une campagne de promotion, surfant sur de feintes contradictions. Résonnez trompettes, sonnez tambours. Et proposez, mon cher Chaise, votre rédacteur sans nom au prix Pulitzer de l’infommunication.
Lulu