Un seau d’eau pour Louboutin
Torride
On savait Louboutin incontinent clérical, panégyriste du Puy du Fou, membre influent du Cercle des Trois-Provinces*, on l’imaginait moins en obsédé sexuel. Et pourtant, sa compil’ d’éditos récemment publiée n’est pas à mettre entre les moufles de la première rosière venue.
On vous épargne les préliminaires : Hervé Louboutin s’esquinte le poignet à se répandre en leçons de politique étrangère, ou pratique, dans la position du missionnaire, un va-et-vient un peu lourd entre Le Pen et de Villiers. Les femmes au foyer, la grenouille dans le bénitier et l’Ordre règnera… On connaît.
Ça commence à coincer lorsqu’il exhibe son « sexe » (titre d’un de ses éditos) au premier lecteur qui passe. « Les histoires de salle de garde ne font de mal à personne », pardonne-t-il d’avance, mais attention, « la vague pornographique (…) submerge depuis bien longtemps les sociétés développées et libérées ». Les ligues de vertu ne sont pas loin…
Mais Louboutin quitte le salace pour des zones plus dangereuses lorsque, entre autres, il éructe contre une campagne qui osait recommander aux vacanciers « Sortez couverts ! » Sa crainte ? Qu’aux jeunes enfants qui interrogent leurs parents, « ces derniers, confondus, laissent entendre en bredouillant qu’il pourrait bien s’agir d’une nouvelle marque d’imperméables pour la rentrée des classes… » Espérons que les mômes aient d’autres lectures que Presse- O. ! « Au nom du Sida », il pourfend une association de lutte contre la maladie coupable à ses yeux de « vouloir défendre les droits de l’homme et l’abolition des discriminations sexuelles. Comme si, conclut-il, les pratiques d’une minorité étaient devenues, hélas, ceux (sic) de la population toute entière. » Louboubou en perd le genre… Pour lui, aucun doute, il ne faut pas « permettre la libre expression de tous les élans (…), les plus risqués » comme de bien entendu. En clair, à la « Une » de Presse‑O., sida = pédés. Simple. On n’ose imaginer notre charmant éditorialiste en d’autres temps avec les mêmes mœurs.
Collé au pape, Louboutin n’hésite pas une seconde : « l’usage de préservatifs, recommandé par les médecins, ne doit pas apparaître comme une obligation mais comme un conseil judicieusement prodigué. » De là à expliquer comment ça se met, faudrait voir à ne pas exagérer non plus…
Mais Louboutin sait-il seulement de quoi il parle ? Il a le sexe triste. « On réduit l’amour physique à une sordide mécanique alors qu’il est d’abord passion et communion », se lamente-t- il. Eh oui, comme la plupart des plumitifs réacs, Louboutin a un problème de libido éditoriale. Le sexe, physique comme il dit, est dans sa bouche, si j’ose dire, forcément sordide. Pas ludique, pas amoureux (il préfère dire « passion », avec flagellation ?), juste sordide. Bonjour à madame…
* Bretagne, Anjou, Poitou. Association ultra-réac née en 65 sous le double choc indo-algérien, foyer de traditionnalisme militant visant à relancer un combat nationaliste trempé d’idéaux cathos et de farouche résistance au marxisme.
À contre courant, d’Hervé Louboutin. 200 éditoriaux aux célèbres éditions Giotto. 308 pages, 98 F.