L’expert couvre les toitures qui fuient

Publié par lalettrealulu le

Appelez-moi maître d’œuvre

Hervé Lorieux, maître d’œuvre à Guérande et expert auprès des tribunaux, n’aime pas faire de la peine à ses camarades artisans. Même lorsqu’ils travaillent comme des manches.

Un toit flambant neuf qui fuit, une cloison qui tombe en ruines quinze jours après avoir été érigée : rien de plus normal pour Hervé Lorieux, maître d’œuvre à Guérande et expert auprès de la cour d’appel de Rennes. Ça fait partie des aléas de la construction et puis, si on commence à mettre en doute le savoir-faire des artisans, jusqu’où s’arrêtera-t-on ? Spécialiste de l’expertise sommaire, Hervé Lorieux a fini par s’attirer quelques solides inimités du côté des particuliers floués, qui tenent de dénoncer sa « partialité » devant les tribunaux, sans succès pour l’heure.

Et pourtant, dieu sait s’il en faut un moral d’acier et un portefeuille bien rempli pour mettre en cause les conclusions d’un expert judiciaire. En témoigne l’expérience du couple Thomas à Saint-Joachim, dont la construction de la maison est bloquée depuis trois ans, les parpaings à l’air, en raison de fuites constatées dans la toiture neuve. Hervé Lorieux, qui s’est contenté d’examiner le toit depuis le rez-de-chaussée, ne démord pas : tout va bien. Une petite couche de laine de verre sous les ardoises et les fuites ne se verront plus. Et puis, si le propriétaire, qui a dû verser 5 000 F de provision avant le déplacement de l’expert, n’est pas content, il n’a qu’à faire analyser ses ardoises « premier choix » par un laboratoire patenté, pour la modique somme de 22 000 F. Les Thomas ont préféré se payer une contre-expertise, qui atteste des malfaçons. Mais cette contre-expertise ne pèse pas grand-chose devant la justice, et les malheureux propriétaires, contraints de payer un loyer depuis trois ans, faute de pouvoir emménager dans leur maison, attendent que la cour d’appel se prononce.

Le scénario est comparable à La Chapelle-Launay, où un jeune agriculteur, Bruno David, a fait cosntruire une cloison par un « homme de l’art ». L’artisan ne s’est pas contenté de saloper le travail, posant notamment des briques verticales et gonflant les joints au plâtre, il a également massacré le parquet en chêne qui venait d’être posé. Un constat, validé par huissier, qui n’a pas sauté aux yeux de Hervé Lorieux, pour qui tout baigne. Selon lui, c’est la faute au plancher si la cloison n’a pas tenu, plancher pourtant parfaitement posé selon tous les spécialistes, dont un architecte, venus constater les dégaâts. Après avoir obtenu la tenue d’une deuxième expertise, qu’il souhaitait filmer en vidéo, le client retors s’est carrément fait insulter par l’expert, qui a refusé de procéder à une seconde visite. De procédure en procédure, d’expertise en contre-expertise, qui donnent toutes raison au propriétaire, la justice joue les précieuses et attend des jours meilleurs pour se prononcer. En attendant sans doute que les clients se fatiguent et poursuivent les travaux, effaçant ainsi définitivement les malfaçons des malmaçons.