Et voilà le travail !

Publié par lalettrealulu le

Arbeit macht frei

La crise a bon dos. Vu qu’on se bouscule au portillon, les patrons retrouvent des vieux reflexes, bafouent la loi pour maintenir la pression sur les candidats au boulot. Comme dit l’autre, le travail est bon pour l’homme ; il le divertit de sa propre vie.

Anticloque

Postulant pour un job de secrétaire comptable dans un garage de la presqu’île guérandaise, une jeune femme s’est vue exiger de signer un engagement sur l’honneur de ne pas être enceinte dans le délai de son contrat de travail. Pour être embauchée, elle a signé le document qui n’a pourtant aucune valeur légale. Encore un patron qui ne veut pas financer le repeuplement de la France. Il mérite l’indignité nationale.

Impôts longue durée

Intérieur, jour. La scène se passe dans un bureau de l’ANPE. Le chef de centre démarre son entretien avec un chômeur longue durée par un édifiant : « Ce matin j’ai reçu ma feuille d’impôts. Y’en a marre de payer pour les autres ! » Toujours sympa à entendre, quand on émarge à 2 500 F par mois. Prenant de haut ce parasite, qu’il faut officiellement dénommer chômeur, il néglige ses lettres de recherche d’emploi dans le cinéma, se fout pas mal des stages décrochés auprès de pros de la caméra, et le sermonne sur ses prétentions : « Redescendez sur terre mon pauvr’ petit bonhomme. Vous n’avez qu’un CAP de mécanicien, vous n’êtes pas à la hauteur, mon p’tit Monsieur », avant de manier la menace : « Si vous voulez pas changer, j’ai qu’une signature à faire et vous êtes radié. Vous habitez en caravane ? Je ne pense pas que les Assedic seraient contents de savoir comment vous vous débrouillez. » Pour être un chômeur moderne, il faut sans doute vivre au dessus de ses moyens, tout en étant candidat sans prétention.

Chasse prime

Entretien d’embauche chez un loueur de cassettes vidéo. « Combien m’apportez-vous ? », demande le commerçant au candidat qui ne comprend pas. « Combien d’aides publiques, de primes ? Débrouillez vous, faites le tour de tous les organismes et revenez me voir avec ce que vous me rapportez. » La compétition entre les chômeurs les transforme en prospecteurs d’aides publiques. De la dignité, que diable. Un pauvre demandeur d’emploi peut donc, s’il a de la volonté, bien sûr, se présenter comme un chasseur de primes légales et autres cadeaux faits à son futur patron. Jackpots de tous les pays, unissez-vous !

Requalif éjectable

Une femme effectue un stage dans une entreprise d’informatique de Saint-Herblain. La boîte traversant une passe de surcharge, la stagiaire est amenée à travailler le samedi. Bénévolement. Mais cet effort semble payer : après test et entretien, elle décroche un CDD de deux ans, en contrat initiative emploi. Au bout de deux mois et demi, patatras. L’employeur explique qu’il s’est trompé dans la définition du profil de poste et qu’il ne peut garder la jeune femme. Il lui demande alors d’arranger le coup en acceptant de changer son temporaire CDD en CDI, contrat à durée indéterminée. Cette bizarrerie n’a qu’un but : éviter une procédure de licenciement et les indemnités qui vont avec, en lui substituant une rupture de période d’essai. Consultée, l’Inspection du travail indique que le patron est en tort. Un avocat s’apprête à défendre le dossier aux prud’hommes, quand il découvre que le chef d’entreprise en question siège justement au prud’hommes, décourageant finalement sa cliente d’intenter un recours. Par pragmatisme. Pour éviter d’être grillée. Sans espoir, elle se résout à signer un papier antidaté d’un mois et demi, tout bénef pour son employeur.
Moralité : le travail, c’est pas toujours une trouvaille.