Tram : finition de travaux finis
Raillerie
« Pratiques occultes », « fausses factures » : le pédégé de la société MSD est descendu du tram en marche. Et règle ses comptes.
Le parquet de Bordeaux a ouvert en novembre une enquête judiciaire sur l’un des marchés du tramway bordelais, suite aux révélations de Robert Riblet, pédégé de MSD. Ce fabricant de blocs en caoutchouc recyclé destinés à éviter les vibrations du tram, n’y va pas par quatre voies ferrées : « la concurrence sur les marchés du tramway est faussée*», affirme-t-il aux enquêteurs. Dans sa ligne de mire, Drouard SA et Cogifer TF, deux sociétés qui interviennent dans la pose des rails de la plupart des marchés de tramway en France.
Privé de ces marchés, Riblet n’a plus rien à perdre et balance les intentions de ses ex-petits copains. « Le principe est simple, Drouard et Cogifer décident du prix qui doit être appliqué par leur fournisseur, 15 % plus cher que le prix en direct, auquel elles ajoutent 30 francs HT de frais de finition par mètre linéaire de rail.» Ces frais restent « à la charge de MSD », c’est-à-dire qu’ils lui sont facturés par les sociétés détentrices du marché. Le tout dans un accord qui doit rester confidentiel. Là où ça déraille, c’est lorsqu’on apprend que le produit de ce sous-traitant « ne nécessite aucune finition sur le chantier », détail confirmé par d’autres tramwayeurs comme la RATP.
« C’est tout simplement de la fausse facture, assure Robert Riblet, l’argent que j’étais censé reverser ne correspondait à aucune prestation réelle. Mais il devait bien servir à quelque chose (…) À partir du moment où l’on ne peut répondre en direct et où il faut passer par des entreprises générales qui jouent le rôle d’intermédiaires, il y a un brouillage.»
Brouillé, le pédégé a pris sa plume pour narrer l’affaire au procureur de Nantes début novembre : « C’est pour avoir refusé d’adhérer à ces pratiques occultes que nous nous sommes vus annuler nos commandes pour le tramway de Nantes…», plus précisément le marché des ateliers-remisage Dalby, confié en avril 99 à Cogifer et à une boîte allemande pour la sous-traitance des caoutchoucs. Interrogés, les services du District et de la Semitan « tombent des nues ». Espérons qu’ils s’en relèvent. Chez Cogifer, qui n’apprécie que modérément de voir ses documents confidentiels se balader, les nues se font plus obscures : « On ne peut pas vous expliquer les relations qu’on a, c’est trop délicat.Mais ce que je vous dis n’a rien à voir avec notre réponse officielle ». Laquelle souligne que l’accord cadre confidentiel entre Cogifer et MSD « n’a jamais à ce jour reçu application ». En clair, MSD n’a pas eu l’affaire, l’affaire n’existe donc pas. Seule reste l’intention. Et l’on n’ose supposer que d’autres sous-traitants du tram aient accepté de rouler dans la combine.
À part ça, le prix du ticket de tram est toujours à huit balles.