Silence, on bulle

Publié par lalettrealulu le

Blakaout

Les trous de mémoire de la Bretagne en bande dessinée, énième épisode.

Il ne faut pas lire les journaux. Alerté par un article d’Ouest-France vantant le 9e tome de L’Histoire de la Bretagne en BD de messieurs Secher et Le Honzec, et protestant contre une signature des albums par le dessinateur à Leclerc Atlantis, le comité de vigilance contre l’extrême droite* s’est fendu fin janvier d’une lettre ouverte à la presse qui s’est aussitôt noyée dans un silence assourdissant. Aucun lecteur d’Ouest-France, ni même de Presse-Océan ou de L’Hebdo, aucun auditeur de Radio-Bleu Loire-Océan, qui a fait l’éloge de l’album offert à quelques rapides du téléphone, ne saura les reproches fait à cette série. On ne froissera pas Leclerc, un annonceur de poids. Le comité relevait notamment : « Mai 68 semble se limiter à une « contestation d’étudiants gauchistes » cantonnée à Paris. Pas un mot sur la situation en Bretagne. Ne s’est-il rien passé à Nantes au sein de la SNIAS, première usine de France en grève en mai 68 ? (…) Est-ce faire preuve de « pédagogie » que d’omettre d’indiquer que si les dirigeants du Parti National Breton sont partis en Allemagne en août 1939, c’était pour chercher appui auprès des nazis ? Qu’ils sont revenus dans les fourgons de la Wehrmacht le 1er juillet 1940 ?« 

À côté de ces oublis, le choix de certains termes peut surprendre : les 60 000 soldats de l’armée bretonne levée par la Général de Keratry en 1870 sont-ils « concentrés au camps (sic) de Conlie » pour laisser entendre qu’ils subissent les camps de concentration avant l’heure ? Ces vigilants contre l’extrême droite se demandent si le terme de « génocide culturel » appliqué à l’interdiction de la langue bretonne n’est pas « quelque peu excessif » : « Dans cette BD, seul le génocide perpétré par les Khmers rouges au Cambodge a droit à cette appellation – et au dessin d’une pyramide de crânes. Les 6 millions de morts de la Shoah, curieusement oubliés dans l’édition originale, sont évoqués en vingt petits mots, et sans une seule illustration, dans les pages de Ouest-France. Comme s’ils n’étaient qu’un simple détail de l’Histoire. Le caporal Bouétar « premier tué du débarquement » selon les auteurs, a droit, lui, à son portrait ». Relevant les états de service de Le Honzec au journal Minute, et l’étude de Reynald Secher « faisant un parallèle entre le génocide juif et un prétendu « génocide vendéen » curieusement sous titré « la manipulation de la mémoire », le libelle du comité de vigilance conclut que tout ceci « ressemble furieusement à une volonté délibérée de révisionnisme historique ». Quoi, quoi, quel délit de béret ?

* où se retrouvent une vingtaine d’associations et partis politiques, dont le PS, La PC, la Ligue des droits de l’homme, la Licra, le Planning familial…