La CGT déniche une fumerie clandestine

Publié par lalettrealulu le

Le Lotus Bleu

À l’hosto, il n’y a pas de fumée sans feuilleton répressif.

Sont rudement pas aidés, les pensionnaires du premier étage nord de l’hôpital St-Jacques. Ce centre de rééducation pour les grands accidentés est peuplé de para et tétraplégiques à roulettes, atterris là après de graves accidents. La vie ne les a pas gâtés. Le syndicat CGT de l’hosto non plus.

La section CGT de Saint-Jacques dénonce les malades par voie de presse, pour la seconde fois cette année. Cet été, Ouest-France* titre « Le tabagisme et les drogues illicites à l’intérieur de l’hôpital ». Le syndicat met dans le même sac cigarette et joint affirmant que « l’hôpital doit être un lieu exemplaire ». Pour les poumons du personnel, les risques d’incendie, et contre l’insécurité. Des enjeux exemplaires de la dérive sécuritaire qui flotte dans l’air.

Il faut donc priver de tabac ces patients, si dangereux que certains ne peuvent même pas fumer seuls ! Les autres sont cloués au lit, ne sortent jamais du service. Sylvie Gautier, la directrice de l’hôpital, indique qu’un secteur a été aménagé pour les fumeurs au rez-de-chaussée. En oubliant de dire que ce secteur est inaccessible aux plus gravement atteints en fauteuils roulants. En oubliant que ce local de quinze mètres carrés n’a pas d’extracteur de fumée. Que depuis la montée au créneau du syndicat, les cendriers ont été retirés du secteur où les fumeurs étaient tolérés au premier étage nord, mais pas dans le local du personnel soignant qui n’est pourtant pas autorisé comme compartiment fumeurs.

Quant aux « drogues illicites », la police a été appelée pour faire une descente. Faut dire qu’un visiteur était très suspecté « d’attitude équivoque ». La flicaille est pourtant repartie bredouille. Rien trouvé d’illicite. La dénonciation était sans doute trop équivoque.

Tout ce foin pour priver de cigarette ou de joint des malades bien abîmés, qui n’ont que ça comme évasion… Histoire d’oublier un instant, s’ils le pouvaient, qu’ils ne marcheront plus, qu’ils ne mangeront plus seuls, qu’ils ne pourront plus vivre sans assistance.

Et tout le monde oublie allègrement que le cannabis est utilisé un peu partout en Europe, comme médicament permettant d’augmenter l’appétit, de diminuer le stress, les contractions musculaires anarchiques, et surtout de permettre à ceux qui en usent, de s’évader d’un corps qui ne leur répond plus.

En revanche, personne ne s’émeut du manque cruel de kinés, qu’on ne remplace même pas lors d’arrêt de travail. Aujourd’hui, il faut savoir qu’un tétraplégique n’a le droit de prendre qu’une seule douche par semaine, faute de personnel hospitalier.

En fin de compte, entre la CGT (de gauche) qui tousse à tort et à travers et le gouvernement Raffarin (de droite, faut-il le rappeler) qui réduit tous les budgets de l’État exceptés les Affaires étrangères, la Défense et l’Intérieur, on peut légitimement s’inquiéter pour le malade. Mais bon, ce ne sont que des survivants. On ne va pas en faire une maladie.

  • Ouest-France, 28 août 2002