Moison invente la gonflette à loyer
Bail, bail
Comment augmenter régulièrement le loyer de ses clients sans en avoir l’air ? C’est un métier : celui de Christophe Moison, administrateur de biens.
Christophe Moison est très fort. Conseiller municipal d’opposition à ses heures perdues, madeliniste à l’UMP, cet administrateur de biens nantais a mis au point une ingénieuse technique pour faire progresser son chiffre d’affaires annuel sur le dos ses 2500 locataires : le renouvellement mécanique des baux tous les trois ans. Dénoncée par l’UFC Que choisir, cette « pratique condamnable » permet d’augmenter discrètement les loyers à chaque échéance, sans dépasser 10 % du prix de base. Il suffit, lors du renouvellement du bail, de montrer que les loyers ont augmenté dans le quartier. Et comme le cabinet Moison gère des dizaines de biens immobiliers dans les mêmes quartiers, l’administrateur se base sur le prix de loyers voisins qu’il a lui-même augmenté pour faire cette démonstration. Pas con.
« Nous n’imposons pas d’augmentation systématique, se défend Christophe Moison. C’est une renégociation et le locataire est en droit de ne pas accepter ». Certes, mais bien des locataires, qui ne connaissent pas bien les textes, se laissent convaincre par leur bailleur. Ce dernier ne se gêne pas pour plaider le nécessaire alignement sur « les prix du marché ». Une amicale pression qui fonctionne d’autant mieux que la tension est forte sur ledit marché, ce qui est actuellement le cas sur Nantes, où l’on frise quasiment la pénurie de logements. Le locataire qui redoute toujours de se faire mettre dehors s’exécute donc dans la grande majorité des cas.
« Que les choses soient claires, explique Hervé Leborgne pour l’UFC : le renouvellement d’un bail est automatique à défaut de congé valablement notifié par le bailleur et il n’est pas du tout nécessaire de refaire un bail tous les trois ans.» Le défenseur des consommateurs précise en outre qu’à l’occasion d’un renouvellement de bail, il n’y a aucune raison d’augmenter le loyer de base, et qu’en tout état de cause le locataire n’est jamais obligé d’accepter une augmentation.
Pour avoir titré « Arnaque au renouvellement du bail » dans sa publication interne en avril dernier, l’UFC Que choisir s’est attirée les foudres du cabinet Moison, qui a exigé un rectificatif. Pour éviter des frais à Christophe Moison et lui épargner de désagréables tracasseries, Lulu se gardera donc de parler d’arnaque, mais parlera plutôt d’entourloupe, ou d’entourloupette, comme préfère le dire Le Robert en donnant comme définition « mauvais tour joué à quelqu’un ».