Un garçon mal perçu (par ses subordonnés en larmes)
Cafouillage
Sale affaire de famille à la CAF. Qui vient de perdre son chef de bataillon disciplinaire.
Rien ne doit changer à la Caisse d’allocations familiales après le départ un peu précipité de son sous-directeur Roger Lecomte. Pour le signifier, la CAF a fait passer dans le journal* un « Communiqué de la Caisse d’allocations familiales de Loire-Atlantique à l’intention de ses partenaires ». Avec un gros titre sur quatre lignes. Le conseil d’administration indique que le numéro 2 de l’établissement a « quitté l’organisme fin septembre ». Euphémisme : il a été proprement foutu dehors. Un conseil d’administration votant le licenciement pour faute, de mémoire de CAFard, ce serait une première en France. Le communiqué rend éloge au partant, presque une notice nécrologique : « Parmi nos mille partenaires, vous étiez nombreux (…) à entretenir avec lui des relations fréquentes, confiantes et fructueuses. » Comme une vulgaire société commerciale s’échinant à rassurer sa clientèle. Comme si les allocataires de la CAF, effarouchés par les mœurs peu amènes de la maison, risquaient d’aller voir ailleurs pour leurs allocs…
Tout ce ramdam provient des rancœurs et humiliations accumulées par les sans-grades et les gradés sous la coupe de Roger Lecomte. Celui qui fut le premier sous-directeur de CAF en France, à partir de 1978, menait apparemment une vie impossible à ses subalternes. À en faire chialer les secrétaires. Ancien maire de Saint-Mars-du-Désert (en fait bombardé à cette place après le décès du maire dont il était alors le premier adjoint), Roger Lecomte a déjà subi d’autres aléas de ses comportements, en politique cette fois. Il s’est fait rétamer propre et net aux dernières municipales, par une opposition menée par la veuve de ce maire qu’il avait remplacé. Cette liste lui a tellement taillé des croupières qu’elle est passée en totalité. Faisant l’unanimité contre lui, Roger Lecomte a obtenu le plus petit score de sa propre liste.
Aujourd’hui amer, retiré sur ses terres, Roger Lecomte confie à Lulu sa conception du management : « Mener des gamins, des paresseux comme de la chiourme. Je veux que quand on travaille, on applique les instructions. Point à la ligne. C’est vrai, j’ai dit à certains que s’ils ne voulaient pas travailler, ils n’avaient qu’à démissionner. Je ne donne pas dans le chrétien de gauche. » Selon lui, c’est pour ses opinions tranchées, de droite, que la CFDT, majoritaire depuis peu, le poursuit de ses assiduités : « C’est du harcèlement », dit le préretraité mis a l’écart anticipé, à qui l’on reproche justement un management un tout petit peu autoritariste. Le voilà contraint de méditer sur la faiblesse des hommes. Par la force des choses.
* Ouest-France, 2 octobre 2002.