La promo pousse-aux-crèmes
Médaille de bronze
Contre les coups de soleil, appliquez la page familles de Dimanche Ouest-France sur la peau. Une fois par semaine.
Conscient des dangers humanitaires que constituent les offensives sournoises du soleil et les morsures redoutables de ce perfide astre rayonnant, Ouest-France a entrepris une grande enquête. Une envoyée spéciale a été dépêchée auprès des têtes de gondole des rayons cosmétiques. Elle a ramené de quoi tartiner deux bons feuillets sur les dernières gammes des labos qui ont concocté d’excellents baumes et de pertinents onguents pour bichonner son épiderme : “neige gommante”, “gélules solaires”, “stick velours visage hydratant” et “gelées auto bronzantes”. L’acquisition du journal dominical n’aura coûté que 80 centimes d’euros, mais, en se conformant aux pertinentes prescriptions de ce sommet du cosméto-journalisme, on peut dépenser 117,05 euros en quatre articles seulement. Et encore, sans acheter pour ses chérubins l’indispensable “tee shirt biologique développement durable toutes tailles de 3 mois à 12 ans”. Suivent deux pleines pages sur les maillots de bain : “Déferlantes de tendances sur les plages”. Incontournable. Le cahier “familles” a dégotté un bikini à 186 euros avec le “détail qui tue, un laçage hyper sexy sur le côté”, et un autre modèle rétro, à 200 euros, forcément inséparable du bonnet de bain à 144 euros pièce. On vous passe les marques, soigneusement citées par ces pages directement branchées sur le carnet de chèque du lecteur. Du téléachat version presse écrite.
Trois jours plus tôt, dans son édito, le pédégé Hutin badigeonne une autre crème, tout aussi onctueuse, sur la presse écrite “absolument nécessaire à la vie d’une démocratie”, tout en remettant une couche sur les dangers de surtaxer cette activité. Dangers qui pourraient, ô désespoir, amener les journaux à “augmenter leurs prix, ce qui pourrait empêcher les lecteurs de les acheter”. Et donc les priver des indispensables diagnostics avisés sur les “spray ultra haute protection” et les “capsules solaires intensives”. Hutin, le boss de ce publimarketing reprend : “L’opinion de moins en moins incitée à réfléchir deviendra de plus en plus instable, changeante et désorientée.” Saisi d’effroi, on imagine une opinion sans repères, ne sachant quelle marque de crème exfoliante pour le corps acheter juste avant l’été, ou quelle griffe choisir pour son bikini en “cuir tricolore monté sur tulle”. L’horreur !