Les casseroles du concasseur de carcasses
Et le radium fut
Guy Dauphin environnement, brave désosseur d’autos. À applaudir tous les soirs à 20h.
Il faut faire la réclame des entreprises qui assurent dans l’ombre des tâches ingrates. Comme celles qui désossent des épaves de bagnoles. À Saint-Herblain, GDE (Guy Dauphin environnement) recycle des autos et des métaux, mais reste trop discret. GDE n’a pas su faire de retape après le passage de l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) le 23 janvier 2020. C’est pourtant valorisant, la visite officielle d’une autorité… L’ASN a dû faire elle-même savoir que « les conditions d’entreposage de déchets radioactifs, en attente de reprise sur le site lors de la visite, sont insuffisantes et ne permettent pas de garantir la sécurité des travailleurs (absence de local sécurisé, absence de signalisation de la présence d’une source radioactive sur les bidons entreposés, absence de signalisation de la présence d’une zone contrôlée verte…) ». Les inspecteurs sont tombés sur « cinq fûts contenant des sources radioactives entreposées dans un hangar, dans des conditions non sécurisées », la zone vaguement entourée d’un ruban de signalisation. La société n’a pas su vanter la beauté de son dilettantisme, salutaire effronterie dans un monde industriel coincé par tant de normes, que ne cesse de dénoncer le patronat.
Vive la décontrainte
Sur ces bidons non enregistrés, rien n’indique qu’ils contiennent des déchets radioactifs à 16 microsieverts, valeur relevant de « très faible dose » mais nécessitant une zone spéciale, où les salariés ne doivent accéder qu’avec protection, et un suivi dosimétrique adapté, ce qui n’était pas le cas. Selon GDE, les fûts contiendraient une fontaine et un paratonnerre avec du radium 226, du thorium, le tout traînant là depuis 2013, sans documents justificatifs. Sept ans, c’est tellement rien pour du thorium qui a une période radioactive de 14 milliards d’années… Les ponts-bascules pesant les camions sont bien équipés de portiques détectant les cargaisons radioactives mais, pas de bol, l’alarme du portique est mal réglée et les appareils de mesure n’ont pas été contrôlés ni étalonnés depuis au moins trois ans, note l’ASN. Saluons ce magnifique esprit de la liberté face aux contraintes.
Circulaire de rien
Ce sens du bad buzz ne s’arrête pas là chez GDE, proclamé « acteur majeur de l’économie circulaire », mais parfois rattrapé par des courts circuits. Le 13 mai, le site GDE de Montoir a été la proie des flammes. Plus trivialement, il a bien cramé. D’abord des ferrailles puis 700 carcasses de bagnoles attendant d’être broyées. Il faudra 115 pomplards, 20 engins et cinq heures pour maîtriser le feu. Incendie aussi le 7 août 2017 sur le même site (60 pompiers, 25 engins, quatre heures)*.
Mais les puissants broyeurs n’écrasent pas que de la ferraille : un salarié a eu un bras arraché par un engin (Ouest-France, 17/08/2018), un autre y est passé et GDE a été condamné après coup pour « homicide involontaire » par le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire et pour faux et usages de faux, pour avoir, « alors que la victime agonisait, signé un plan spécifique de sécurité sur le capot d’une voiture, afin de se dédouaner » (20 minutes, 14/04/15). Quand on fait dans le circulaire et l’économie, il faut savoir économiser sur la sécurité.
Guido Finasse
Ailleurs, pas mieux : en avril 2020, 900 tonnes d’épaves brûlent sur un site GDE des Yvelines (60 pompiers aussi). Rebelote un mois plus tard sur le même site. À Salaise, en Isère, GDE a dû éteindre onze incendies en quinze ans.