Oncl’ Hervé a le cœur dans sa poche
Radeau nostalgie
Porteur du nom et pièces rapportées, mais tous bien nés et arborant particule et cœur vendéen, trois cent descendants directs ou « par les femmes » de la famille Charette se sont réunis en août à la Chabotterie.
Évoquant le temps béni des guerres de Vendée le curé de St-Sulpice-le-Verdon a regretté au sermon : « Ils étaient 5000 femmes et enfants, nous sommes un peu moins nombreux aujourd’hui ». Remake de la vieille histoire des nobles et des manants, les villageois ont du se contenter des bas-côtés pour laisser la travée centrale aux descendants du seigneur qui ne savent même pas par cœur leurs cantiques en latin. Ils n’ont déjà pas appris les paroles de la Marseillaise (ce chant de coupeurs de têtes, fi !). On se demande ce qu’ils savent chanter. La Vieille France fout le camp.
Champagne sur la prairie. Extraits de la bande son : « Nous nous étions vus à un mariâââge… » Au ministre : « La dernière fois, c’était au Rotary, tu étais venu faire une conférence. Depuis, tu as pas mal bourlingué ». Fleur de lys à la boutonnière : « Je n’ai que des filles. Quatre… Je suis désolé. » Avoir aujourd’hui un ministre de la République dans la famille ? « cCest un peu une ironie de l’histoire, concède René de La Perraudière, descendant de Charette « par les femmes ». Mais il faut avoir du recul. Dans deux cent ans, on célébrera peut être Pétain comme De Gaulle… » Cœur vendéen agrafé à son chemisier bleu ciel, Annick de Lussy a eu sa revanche sur cette « antinomie historique » : la veille, au cours d’un spectacle* consacré à Charette, « le ministre n’a pas eu honte, de monter sur scène et de prendre le drapeau vendéen. Il l’a fait avec une parfaite bonne grâce. Il était chez lui, sur ses terres », dit-elle. Mais si le lendemain, Béatrix de Charette — qui s’avoue proche des légitimistes — a pu vendre 10 F un cœur vendéen à « Oncle Hervé », le ministre l’a discrètement escamoté dans sa poche : la presse le pressait de flashes. « La France, ce n’est pas que le nouveau régime. Il y a l’ancienne et la nouvelle France. La fleur de lys appartient à son patrimoine », lâche un cousin « rapporté » pour sauver l’affront. La parenté ne remonte pas au diable, si l’on peut dire. Mais la famille y tient, surtout à la lignée venue du Zouave pontifical du XIXe. Car « le Général », celui des guerres de Vendée, fut croyant mais peu pratiquant, joyeusement célibataire et amateur de femmes. Sans procréer, l’animal ! S’il n’y avait eu que François Athanase Charette de la Contrie, sa famille n’aurait été qu’un vœu pieu. Et la prairie toute vide.
*comédie musicale consacrée à Charette, adaptée d’une pièce de Marcel Jullian, proche de l’Opus Dei, et qui ne cache pas ses penchants monarchistes.