Les maîtres ennemis
Passage à l’acte
L’association des deux notaires tourne vinaigre. Après les rixes et les procès, la solution sacs de sable est à l’étude.
Notaires à la Chapelle-sur-Erdre, Jean-Pierre Lenglart et Georges Toro sont associés au sein de la même étude. Mais ils ne se parlent plus. Il y a deux ans, Me Lenglart a même agressé son associé après avoir déménagé son bureau, viré le mobilier en son absence et posé des verrous aux portes. Empoignade, injures devant tous les clercs de l’étude. Les lunettes de Me Toro volent. Il est jeté à terre, bourré de coups de pied. C’est la quatrième fois que Lenglart frappe son collègue. Pour un notaire, officier ministériel supposé pétri de circonspection et de tact, ça la fout mal. Les plaintes contre Lenglart pour coups et blessures sont pourtant classées sans suite.
Faut dire que Georges Toro est suspect : c’est un étranger. Il est venu de Vendée pour devenir en avril 1991 cotitulaire de l’étude de La Chapelle. Il rachète les parts de l’associé précédent de Lenglart, un dénommé Busson, qui a la bonne idée de partir avec 230 dossiers de clients pour s’installer à quinze bornes de là,
à Vigneux-de-Bretagne. Le chiffre d’affaire de l’étude s’en trouve fragilisé. Début des ennuis.
Me Lenglart est soupçonné de rendre la vie impossible au nouveau venu, pour le contraindre à jeter l’éponge. Au parquet du tribunal, un juge conseille en substance à Toro : vendez et partez le plus loin possible ! Instance professionnelle directement concernée, la chambre des notaires de Loire-Atlantique est saisie depuis 1992, mais ne règle pas le cas Lenglart. Que son beau frère siège au Conseil supérieur du notariat n’a rien a voir à l’affaire. On ne choisit pas son beauf.
« C’est une anomalie très regrettable, mais c’est un conflit interne. Il n’y a pas détournement ou malversation. Notre pouvoir est limité. Comme un ménage qui ne s’entend pas, on ne peut rien faire », dit le président de la chambre. Il a pourtant fait un peu plus que rien puisqu’il a lancé une procédure disciplinaire. Et curieusement, Lenglart écope en mai 1996 du minimum, un simple rappel à l’ordre, et Toro du maximum, « censure devant la chambre assemblée ».
Hors du cercle des notaires, la tournure est toute autre : la procédure contre Toro est annulé par les juges professionnels de la cour d’appel de Rennes. « On cherche à m’étrangler par tous les moyens », dit aujourd’hui Georges Toro qui reste au centre de 15 procédures judiciaires, la plupart contre lui. Interrogé par Lulu, Me Lenglart refuse tout commentaire. Va falloir intervenir avant que ne se signe un contrat sous sang privé.