Lâchez leur les baskets !
Cher Tartempion,
L’enfance, lieu de tous les délices et de toutes les souffrances, nous l’avons connue. L’adolescence, lieu de tout, itou, itou. Mais pour nos gosses, que pourrions-nous inventer qui leur rende ce passage moins difficile ? L’école, qu’est-ce que ça leur apporte ? Passée la cinquième, ils sont dégoutés à vie du théâtre, de la poésie, de la littérature, de l’histoire, de la culture… Et puis, l’école, c’est pas tout. Il reste la vie. La nôtre, la vôtre, la leur. Et c’est quoi la vie ? Quand même pas un leurre. Se pourrait-il, un jour, que nous offrions à un jeune, un douze-dix-sept ans, un « temps de répit ». Appelons ça une année sabbatique. Pas une année d’errance, pas une année de vide, non ! Un laps de temps au cours duquel il ou elle pourrait découvrir d’autres mondes, d’autres modes de vie. Du temps pour élever des lapins, faire pousser des huîtres, guetter les poissons au fil de l’eau, regarder grandir les arbres ou attendre en polissant des pierres. Sur cent candidats, combien découvriraient les métiers de la campagne, de la montage, de la mer, de l’artisanat ? Et combien en concluraient que le bahut, c’est pas si nul ?
Sur ce, Tartempion, je te laisse à la méditation. Si tu partages ta vie avec quelqu’un, je l’embrasse. Lui ou elle qui lave le chien, sort les casseroles ou rêve devant la cheminée. D.J.
Elle à la rogne tonique. Danièle Jullien est grand-mère à Bellevue, rmiste et hlmiste. Elle pratique la philosophie en pétard, la poésie en résistance et le bon sens frappé au coin de l’utopie. Ce texte futé, elle l’a publié dans le premier numéro d’un magazine, Cité, dédié aux initiatives citoyennes, mais qui n’a pas eu de second numéro. Peu ont pu le lire. La Lettre à Lulu accueille avec plaisir cette voix bouillonnante d’idées décalées qui pourraient bien devenir un jour réalité, en passant comme une lettre à la postérité.