Canton n’a que l’amour

Publié par lalettrealulu le

Sultation

Pas question de passer le département aux oubliettes. Le Conseil général a donc fait un appel au peuple, à la cantonade : réponses en 44 questions.

Votre avis nous intéresse ! ” , a point d’exclamationné l’enquête menée par les instances de Loire-Inférieure de décembre 2002 à la mi-janvier. Car voilà : le Conseil général se sentant menacé par la décentralisation s’en trouva fort marri. Et illico concocta un sondage pour se redorer le blason. Canton par canton, la Loire-Inférieure veut qu’on l’aime et biche d’avoir suscité autant de retours à son questionnaire. Dans sa réponse, un habitant du Pellerin note pourtant qu’il manque une question : “ Dans le cadre de la décentralisation, un Conseil général a‑t-il une raison d’être, entre communes et Région ? ”. Ce qui amène à une autre question : dans le cadre de la suppression du Conseil général, ce questionnaire a‑t-il une raison d’être ?

Un cabinet de redressement

L’enquête qui a coûté 52 000 euros, s’est pompeusement appelée « invitation à la démocratie participative ». Mais faudrait pas penser pour autant qu’André Trillard, son chef suprême se soit laissé séduire par les revendications des Motivé(e)s toulousain(e)s. Non, c’est juste un grand mot pour dire qu’il prend l’avis du populo et que ce qui en sortira pourra servir à inspirer les choix budgétaires à venir. D’ailleurs, tous les chiffres avancés, pourcentages avec un chiffre après la virgule s’il vous plaît, sont en fait très approximatifs. Sur 510 000 questionnaires distribués, la consultation a récolté 24 158 réponses. D’après les experts en communication, c’est un joli score. Mais les résultats chiffrés ne sont soutirés que parmi une sélection de mille réponses au hasard, trafiquées par le cabinet de sondage G & A pour « redresser » l’absence des catégories qui répondent moins à ce genre de questionnaire : jeunes, urbains, prolos. Une grosse cuisine statistique, quoi. L’histoire oubliera vite que 15,8 % n’attendent rien des relations avec leur Conseil général ou que 41,9 % sont infoutus de citer le nom du conseiller général de leur canton.

Pourtant, dans la case laissée libre pour les commentaires et messages aux élus cantonaux, il y a des propositions dignes du plus grand intérêt. Première idée force : « Faire des cases plus grandes dans vos questionnaires ». C’est dit. Et c’est d’Aigrefeuille que surgit cet éclair de la raison. Total respect ! Le reste, les délires sécuritaires de certains, le racisme contre les gens du voyage, les jeunes, les paysans, les « civilisations étrangères », mais aussi les rmistes, les chauffards, les bandits, c’est de la petite limonade, à côté. Certains sont à ce point perturbés, qu’ils en arrivent à déplorer « le manque d’insécurité » et dénomment le questionnaire un « interrogatoire ».

Le look plouc à Dédé

Reste quelques vérités crues : « Que ceux qui sont sans emploi s’abstiennent de fumer, c’est nocif et ça coûte cher », ou « Réfléchir avant de parler aux idées reçues ». Surtout si elles proposent des bonbons à la sortie de l’école. Un Baulois suggère subtilement de « donner de l’éclairage toute la nuit et non ponctuellement comme à ce jour ». Un résidant de Legé a un avis qui est un vrai programme : « Empêcher les Bretons de franchir la Loire », quand un Nantais demande instamment « un suivi des réponses auxquelles j’ai répondu ». On découvre par une de ces confidences qu’il y a un vrai problème de chauffage dans le bus Nozay-Nantes. Un message perso, « Bonjour à Brigitte », s’est glissé entre les « Joyeux Noël » et les « Merci ».

Des contribuables s’alarment du manque d’entretien paysager des bretelles d’autoroute, ou – presque aussi grave – de « l’image du président du Conseil général. Le look paysan n’est pas représentatif du dynamisme du département », alors qu’un autre regrette que le mensuel départemental devienne « le support du culte de la personnalité de son président ! C’est lassant. Électeur de droite, je vais finir à ce régime, à me situer dans l’opposition », quand André Trillard n’est pas traité de « chef de clan ». Répondez, André, voyons, la Loire-Inférieure d’en bas vous manque de respect !