Ouest-France remplit son sac à provisions
Exercice
Diable, Ouest-France aurait-il peur de passer ses vieux jours, abandonné de tous, dans sa pension rennaise du Pré-Botté ? Ses comptes 2002 recèlent une curiosité, un OFNI, un objet fiscal non identifié, officiellement dénommée « provision » et pesant 2,45 millions d’euros : ce délicieux terme désigne une acrobatie comptable très pratique pour alléger la déclaration fiscale de la boîte. Certains esprits comptablement pernicieux estiment que cet exercice de voltige pas très catholique ne satisferait pas à tous les dogmes du droit canon fiscal.
La somme correspond à la totalité des deniers que le journal breton débourserait en 2003 si tous, absolument tous ses salariés avaient décidé de le quitter au su de leur plein gré. Bonne mère, la maison leur octroierait alors une prime estimée en moyenne à 1 500 euros par tête. Sauf que, jusque-là, la valeur de ces versements n’était inscrite à l’exercice qu’une fois les départs réellement effectués. Main sur le cœur, les dirigeants affirment que ce petit jeu d’écriture leur est désormais imposé par les commissaires aux comptes. C’est donc de la faute aux nouvelles normes si l’opération contribue par la plus grande des providences à diminuer l’impôt sur les sociétés. Et si la participation à verser aux salariés se rétrécit après un passage dans le tambour de la machine à calculer… À moins qu’il ne s’agisse d’un ultime acte de contrition du premier quotidien de tout l’Ouest, et de France et de Navarre : l’orthodoxie chrétienne ne commande-t-elle pas de faire pitié plutôt qu’envie ? Et puis, charité bien ordonnée… Il n’y a que ces mécréants de syndicalistes pour flairer l’entourloupe.